Troisième nuit. Au large des côtes portugaises.
Au loin : deux bateaux. Le plus proche est un bateau de pêche. Il est pratiquement dans l'axe du bateau. J'attends un peu pour dévier ma route. Vent arrière, ce n'est pas très facile (1). Il y a pas mal de vent, 30 noeuds établis, plus parfois. Le voyant sur babord (à gauche du bateau), je mets quelques degrés sur tribord au pilote automatique afin que l'écart soit plus net.
C'est alors que je le vois changer de direction et venir couper ma route. Du coup je rechange de cap dans l'autre sens, de façon à le voir sur tribord.
Par contre l'autre bateau qui était au loin, est maintenant tout près. L'ayant pris pour un autre bateau de pêche, je découvre que c'est un cargo assez gros. Il vient dans ma direction, et je repars sur la droite pour l'éviter. Et là, j'ai l'impression qu'il tourne vers moi, c'est comme si je fonçais vers lui (avec le vent qu'il y a on avance vite : près de 9 noeuds).
J'ai peur. Je veux appeler B (le skipper), mais je n'ai pas le temps de descendre, la réveiller, la faire monter en urgence. Je sens que si je ne fais rien, on va se rentrer dedans. Je sens aussi une peur qui me tétanise un peu. J'imagine le pire bien sur. La masse se rapproche.
Il faut virer franchement sur tribord de façon à me retrouver sur une route parallèle. (Au début il était sur ma gauche, puis il a tourné pour venir dans mon axe, et continuant allait passer sur ma droite. Je ne pouvais pas aller sur la gauche car je lui serais rentré dedans, et la voile n'était pas du bon côté, il fallait donc aller sur la droite pour l'éviter, si bien qu'on allait se longer de très près, mais s'il devait y avoir un choc il serait légèrement poussant et pas une collision).
C'est ce que je fais. la voile bât. Je me dis qu'il va nous longer sur babord. C'est impressionnant. Je descends alors et troube B dans le carré, qui avait entendu le changement de cap. Elle monte.
Le cargo est quasiment arrêté, toutes lumières allumées. Il est tout près, dominant le cata de toute sa hauteur, peut être 100 m, 200 tout au plus. On règle les voiles. Le cargo repart dans l'autre sens. On réduit la grand voile car il y a trop de vent.
Je n'ai rien compris à sa manoeuvre puisque je cherchais à l'éviter depuis le début.
J'ai une peur par rétrospective. Cette peur va durer jusqu'à ce que j'aille me coucher. Il était 4 H 1/2 et mon quart finit à 6 H.
Je vais au lit et ferme les yeux. Je revois la scène et l'imagination galope, créant un scénario pire, le bateau se fracassant contre l'énorme masse métallique du navire en pleine nuit avec du vent fort et des vagues.
Je rouvre les yeux, reconnais la peur qui est normale, mais ne veux pas que le mental amplifie. Je me dis que j'ai fait ce qu'il fallait, qu'on s'en est sorti et que tout est clair. Il y a eu un concours de circonstances dans la nuit entre le bateau de pêche qui a changé de direction, moi au milieu et le cargo à côté qui a changé sa route, ne comprenant sans doute pas mes manoeuvres.
Maintenant je m'endors tranquille.
(1) Sur un voilier le vent arrière n'est pas évident pour manoeuvrer car la grand voile est complètement ouverte sur un côté. Si on veut changer de sens cette voile, on appelle cela empanner, alors elle traverse toute la largeur du bateau. Plas la voile est grande, plus c'est dangereux, s'il y a pas mal de vent, ça l'est encore plus. Il faut donc contrôler ce passage. Sur ce genre de bateau cela ne se fait pas tout seul.
Au loin : deux bateaux. Le plus proche est un bateau de pêche. Il est pratiquement dans l'axe du bateau. J'attends un peu pour dévier ma route. Vent arrière, ce n'est pas très facile (1). Il y a pas mal de vent, 30 noeuds établis, plus parfois. Le voyant sur babord (à gauche du bateau), je mets quelques degrés sur tribord au pilote automatique afin que l'écart soit plus net.
C'est alors que je le vois changer de direction et venir couper ma route. Du coup je rechange de cap dans l'autre sens, de façon à le voir sur tribord.
Par contre l'autre bateau qui était au loin, est maintenant tout près. L'ayant pris pour un autre bateau de pêche, je découvre que c'est un cargo assez gros. Il vient dans ma direction, et je repars sur la droite pour l'éviter. Et là, j'ai l'impression qu'il tourne vers moi, c'est comme si je fonçais vers lui (avec le vent qu'il y a on avance vite : près de 9 noeuds).
J'ai peur. Je veux appeler B (le skipper), mais je n'ai pas le temps de descendre, la réveiller, la faire monter en urgence. Je sens que si je ne fais rien, on va se rentrer dedans. Je sens aussi une peur qui me tétanise un peu. J'imagine le pire bien sur. La masse se rapproche.
Il faut virer franchement sur tribord de façon à me retrouver sur une route parallèle. (Au début il était sur ma gauche, puis il a tourné pour venir dans mon axe, et continuant allait passer sur ma droite. Je ne pouvais pas aller sur la gauche car je lui serais rentré dedans, et la voile n'était pas du bon côté, il fallait donc aller sur la droite pour l'éviter, si bien qu'on allait se longer de très près, mais s'il devait y avoir un choc il serait légèrement poussant et pas une collision).
C'est ce que je fais. la voile bât. Je me dis qu'il va nous longer sur babord. C'est impressionnant. Je descends alors et troube B dans le carré, qui avait entendu le changement de cap. Elle monte.
Le cargo est quasiment arrêté, toutes lumières allumées. Il est tout près, dominant le cata de toute sa hauteur, peut être 100 m, 200 tout au plus. On règle les voiles. Le cargo repart dans l'autre sens. On réduit la grand voile car il y a trop de vent.
Je n'ai rien compris à sa manoeuvre puisque je cherchais à l'éviter depuis le début.
J'ai une peur par rétrospective. Cette peur va durer jusqu'à ce que j'aille me coucher. Il était 4 H 1/2 et mon quart finit à 6 H.
Je vais au lit et ferme les yeux. Je revois la scène et l'imagination galope, créant un scénario pire, le bateau se fracassant contre l'énorme masse métallique du navire en pleine nuit avec du vent fort et des vagues.
Je rouvre les yeux, reconnais la peur qui est normale, mais ne veux pas que le mental amplifie. Je me dis que j'ai fait ce qu'il fallait, qu'on s'en est sorti et que tout est clair. Il y a eu un concours de circonstances dans la nuit entre le bateau de pêche qui a changé de direction, moi au milieu et le cargo à côté qui a changé sa route, ne comprenant sans doute pas mes manoeuvres.
Maintenant je m'endors tranquille.
(1) Sur un voilier le vent arrière n'est pas évident pour manoeuvrer car la grand voile est complètement ouverte sur un côté. Si on veut changer de sens cette voile, on appelle cela empanner, alors elle traverse toute la largeur du bateau. Plas la voile est grande, plus c'est dangereux, s'il y a pas mal de vent, ça l'est encore plus. Il faut donc contrôler ce passage. Sur ce genre de bateau cela ne se fait pas tout seul.
6 commentaires:
pas facile....
être skipper est un vrai métier et être équipier sur un catamaran ne s'improvise pas.
Moi, j'ai eu des frayeurs l'an dernier, je ne me sens pas prête du tout encore...
alors, tu as bien géré malgré tout ; ta peur est légitime et est sûrement porteuse ? Toi seul sait...
bravo encore.
je relis le récit, 2 fois, 3 fois, j'essaie de bien piger ce qui s'est passé....
alors, bilan des courses concernant la grand voile ?
as tu fait un empannage ? forcé ? ou simplement n'y a t-il eu que fassayage de la voile ?
j'ai du mal à me faire le film, à imaginer en tout cas...
trop chouette Yannick ce partage. Merci et encore chapeau !
bisous, martine
La grand voile était sur babord, j'ai viré à tribord, donc loffé, il y a eu fasseyage, Martine.
tu veux dire empannage alors.
super bien géré, félicitations Yannick. Biz.
Non la grand voile est resté à babord, ce n'est pas un empannage...
ok, alors, tu n'as pas viré de bord, tu as simplement pris qq degrés à tribord en loffant.
ça a du sacrément fasseyé vu le vent qu'il faisait....
Enregistrer un commentaire