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lundi 25 juillet 2011

Se dire au revoir

"On peut se dire au revoir plusieurs fois" est le dernier livre de David Servan Schreiber.
Il vient de mourir ce soir...
Atteint d'une rechute de cancer au cerveau, qu'il aura tenu à l'écart 19 ans.
Il avait 50 ans, ce qui veut dire que son cancer a été découvert à 31 ans.
Ses livres, vendus à des millions d'exemplaires, parlent des méthodes qu'il défendait pour affronter la maladie, et guérir si possible (Anticancer, Guérir...).
Une vie de surmenage pendant longtemps. Certainement que sa passion, son travail, son partage au travers de ses livres et de ses nombreuses conférences, ont sauvé des vies, aidé de nombreuses personnes, soulagé, allongé la vie de beaucoup, et aidé d'autres à prendre conscience de leur propre vie.
Cela peut alors sembler injuste qu'une telle personne meure d'une rechute dont il savait qu'il ne réchapperait pas. Au début on lui parlait de 6 ou 7 ans, il a tenu 19 ans, ce qui est en soi un exploit.
Je me dis que ce doit être vraiment difficile d'apprendre à 31 ans que l'on a un cancer au cerveau (ou ailleurs). Et même plus tard.

En une année, des personnes qui se connaissaient ont témoigné de cette terrible maladie qu'est le cancer : Bernard Giraudeau, Guy Corneau et lui. Si Guy Corneau s'en est tiré, les autres non. Leur point commun, c'est qu'ils avaient mis en oeuvre tout ce qu'ils pouvaient comme méthodes douces pour contrebalancer les effets de la chimio et se nourrir de vivant. Tous trois faisaient de la méditation, ce qui leur a permis de prendre du recul. Giraudeau et Servan Schreiber sont morts dans une certaine sérénité, dans une certaine acceptation de ce qui leur arrivait, d'après les témoignages. Je pense aussi à Christiane Singer, morte d'un cancer il y a quelques années.

Mourir est inévitable, on ne peut se battre contre ça. Mourir jeune, ou paraissant encore jeune, est une autre affaire. J'imagine que cela doit provoquer, dans le temps qui leur reste à vivre, un saut de conscience phénoménal. Apprendre à goûter d'autant mieux le présent, finir ce qu'il y a à faire, l'indispensable important. Dire les choses essentielles à tous ceux qui nous sont proches. Dire au revoir, aussi, d'où le titre du livre.

Il y a deux jours, on parlait justement de la mort avec une amie, de ceux qui partent jeunes. Je faisais remarquer que ce devait être plus terrible pour ceux qui restent, quand c'est le conjoint, ou les enfants.
Ce soir, en y pensant, je réalise que si ceux qui savent qu'ils vont mourir entreprennent un chemin d'acceptation, de détachement, pour apprivoiser la mort, ce n'est pas forcément le cas de ceux qui restent. Ils restent peut être plus dans une sorte d'impuissance face à cette "fatalité". Ils peuvent ressentir d'autant plus un abandon, une perte, et donc refuser cette réalité difficile. Récemment une dame me parlait de sa souffrance, non encore évacuée, liée à la mort de son jeune fils de 11 ans, il y a plus de 20 ans.
Une personne sur un chemin, qui va mourir, peut finalement aider ceux qui restent à apprendre à faire le deuil, les aider à dire eux mêmes au revoir au lien qu'ils ont eu ensemble.
En fait les plus vivants, je parle de niveau de conscience, devraient aider l'autre à appréhender la mort, ou le fait de se quitter. Cela commence certainement tout de suite, par la vigilance et l'apaisement progressif du mental. Car nul ne sait quand cela arrive.
J'ai la chance d'être en bonne santé, je ne sais donc pas comment je vivrais la nouvelle si j'apprenais que je suis atteint de maladie grave. J'ai juste l'expérience de la mort de ma mère, et d'un second infarctus de mon père il y a quelques jours. Je ne peux que remercier l'enseignement et ceux qui m'ont aidé à grandir pour l'avoir vécu comme je l'ai vécu.

"Philosopher, c'est apprendre à mourir".

4 commentaires:

Acouphene a dit…

Merci Yannick ! En pensée avec toi !

Isabelle a dit…

Bonjour Yannick, tu nous apprends la nouvelle alors qu'on parlait encore de lui hier soir et de son livre Guérir.

Ce qui m'interpelle dans cette nouvelle c'est que l'on parle de "rechute"... un terme bien médical et bien négatif qui minimise son travail et qui donne l'impression que David S.S a vécu un sursis de 19 ans, dans un état de rémission.

En fait, à 31 ans il a trouvé un obstacle sur son chemin, il l'a étudié, observé, il l'a franchi et il a montré le chemin à bien d'autres... et puis, dernièrement un autre obstacle, similaire au premier est apparu. Cette fois-ci il est passé à un autre niveau de sa recherche, de sa découverte... la mort n'est qu'un passage.
Ne voyons pas cela comme un échec :)... et ses livres seront toujours le support inconditionnel de ceux qui se retrouvent, jeunes ou moins jeunes, face à un obstacle qui obscurcit l'horizon.
Merci pour ton blog, tes enseignements, ce regard à l'intérieur de nous-même que tu proposes.
A bientôt!

Yannick a dit…

Isabelle, pour les détails concernant cette rechute, DSS en parle lui même dans un interview qui a &t& diffusé sur le blog d'Acouphène.
Le mot échec est un terme moraliste je pense. Je ne l'ai pas utilisé, et je ne crois pas que DSS l'ai repris à son compte. Ce que disent les autres les regardent. Merci de ton commentaire.

Avec toi aussi Eric.

Mabes a dit…

oui j'avais vu aussi cette dernière interview chez Phytospiritualité... qui m'avait émue... par son élévation de conscience.

et je me souviens qu'il a découvert son cancer au cerveau "par hasard" : en remplaçant un "cobaye", il a passé un IRM... pour faire avancer la recherche qu'il menait avec deux amis en neurobiologie...