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lundi 24 juin 2013

Ado et autorité

Lors d'une réunion avec un groupe de personnes, une femme expose sa situation du moment.
Elle s'occupe d'une jeune fille depuis plusieurs années, en jouant le rôle de mère de remplacement. Cette fille a fui sa maison et sa mère pour je ne sais quelle raison, et son père ne s'est jamais occupé d'elle. Elle a 19 ans aujourd'hui et a une vie amoureuse assez "libre". Sans rentrer dans les détails, il se trouve qu'elle utilise une pièce pour ses ébats, qui est aussi une chambre ponctuelle de celle qui lui tient le rôle de mère. Chambre qu'elle laisse dans un état qui nécessite un nettoyage qu'elle n'assume pas. Ce qui choque sa "mère".
Bref la confrontation arrive sur un ton nouveau qui laisse mal en point cette "mère" qui n'a jamais eu d'enfant.
Elle découvre une ado qui manque totalement de respect. Comment faire?
Elle découvre en fait une relation qui devient conflictuelle alors que tout s'était bien passé jusqu'à présent, et qui de plus vient lui rappeler sa propre relation avec sa mère. D'où une certaine incapacité à gérer. On tente de répondre, d'expliquer. Il est évident qu'il faut qu'elle se positionne, qu'elle impose des règles afin de se sentir respectée, tout en laissant de la liberté.
Je lui explique que vue la situation familiale, cette ado cherche sans doute la confrontation à l'ordre, à la loi, aux limites, qu'un père absent ne peut lui offrir. Et qu'elle se retrouve avec un rôle double, de mère et de père, pas facile à jouer avec une fille qui a été lâchée par ses parents biologiques. J'ajoute que c'est un fait reconnu que beaucoup de jeunes délinquants ont un père absent ou démissionnaire et cherchent la confrontation avec la loi derrière leurs actes de violence.
C'est alors qu'un ami intervient pour raconter une histoire. Il a été responsable de maison pénitencière. Il en a vu passer des jeunes, dont certains étaient mis au mitard. Il nous explique ce qu'est le mitard, un lieu minuscule et sombre, aucune vue sur l'extérieur, où l'on reste dans la solitude la plus complète pour quelques jours. Une semaine en général, histoire de faire réfléchir. Mais pour les responsables, leur hantise c'est que le jeune déraille. Si cela se passe "bien", ils arrêtent au bout de cinq jours. Il y a des seuils, au bout de 3 ou 4 jours, en fin de journée. C'est là que l'accident peut arriver, qu'un jeune craque tout d'un coup. En général le dimanche après midi.
Un jour, un jeune est dans ce cas. Un dur apparemment. Au bout de ces trois ou quatre jours, un dimanche en fin d'après midi, le gardien entre dans sa cellule et lui dit : " C'est un père qui t'a manqué, tu as fait ça parce que tu ne sais pas ce qu'est l'autorité!"
A la surveillance du soir, le gardien l'a retrouvé mort. Il s'était suicidé, lui qui avait tenu plusieurs jours sans broncher. Cet ami nous explique qu'ils arrivent à se pendre avec un habit attaché à leur lit, et que même 30 cm suffisent pour se laisser étrangler.
Le gardien et cet ami responsable ont été mal pendant des semaines et des mois. Le gardien en particulier, qui s'est senti coupable et n'arrivait plus à dormir. Cela a duré très longtemps pour lui.

Curieuse histoire où une femme découvrait que son problème du moment la renvoyait à quelque chose non résolue avec sa propre mère, et où mon intervention a rappelé un souvenir douloureux à cet ami.
D'une façon ou d'une autre on est tous relié.

2 commentaires:

Acouphene a dit…

Oui et chaque événement extérieur est un renvoi à un monde intérieur. Je le ressens de plus en plus !!!

philippe a dit…

Mettre de l'ordre dans sa vie!