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lundi 11 octobre 2010

Pour l'amour de Massoud


J'ai toujours eu une attirance particulière pour l'Afghanistan, et je fus réellement attristé par l'invasion soviétique, puis par ces années de guerre. Le commandant Massoud avait toute mon admiration, allez savoir pourquoi. Cet homme semblait intègre, bien au dessus de tous les chefs de guerre, et autres pays un jour attaquant, un jour aidant, ou vice et versa.

Ayant lu plusieurs livres sur Massoud, je finis actuellement "Pour l'amour de Massoud" un livre coécrit par sa femme Sediqa Massoud et Marie Françoise Colombani.
Ce témoignage unique nous permet de voir d'une part la vie en Afghanistan pendant cette terrible guerre, où en quelques minutes des familles entières sont décimées par les attaques soviétiques, où les gens fuient avec quasiment rien à travers les montagnes pendant des semaines et des semaines, où les trahisons se multiplient avec pour seul motif l'argent, et au milieu de tout ça des êtres exceptionnels qui sont sans doute dans les traces de cette tradition afghane, soufie, où une parole est une parole, et un être humain une âme avant tout.
Cette jeune femme sans éducation scolaire, fille d'un des proches de Massoud, va être promise à Amer Saheb plus connu sous le nom de Massoud. Elle avait 17 ans quand ils se sont mariés, lui 34. Il a accepté la proposition à condition qu'elle fût d'accord, ce qui est absolument rare dans ce pays. Bien sur cela devait rester secret pour que les Russes n'en profitent pas puisque tout finit par se savoir. Or un mariage dans ces pays traditionnels, a des proportions que nous ne connaissons pas. On peut imaginer les futures histoires de famille, d'amour propre blessé.

Il va éduquer sa femme, lui qui connait vraiment le Coran et la poésie perse. Il ne peut lui faire de cadeau car cela serait aussitôt repéré. Il se servira de sa soeur pour cela.
Ils auront plusieurs enfants et sa femme nous dit qu'il jouait avec eux autant qu'il était possible. De son côté elle lui expliquait la réalité de la condition des femmes afghanes, que les hommes ne connaissent pas, surtout quand ils sont pris tout jeunes dans les madrasas pour alimenter les réseaux talibans, ce qu'ils vont découvrir après la guerre.
Massoud est un homme libre qui considère l'autre comme ayant les mêmes droits. Il est toujours prêt à se dévouer pour la cause de son pays, à pardonner à ceux qui le trahissent, à payer de lui même sans tirer aucun avantage de la situation qu'il occupe.
Il vivait simplement, dormait peu, priait dès le lever du jour et méditait en marchant. Pendant les premières années de la résistance, un théologien l'accompagnait partout et discutait avec lui des commentaires du Coran.
Sa femme le servait, et lui l'aidait à grandir. Il ne lui faisait pas sentir le poids des responsabilités qui pesaient sur ses épaules. Ils vivaient un amour rare, basé sur le don et le respect. Elle était inquiète pour lui, et il était inquiet pour sa famille. Il lui est arrivé à elle de lui désobéir pour rester près de lui quitte à être en danger.
Parmi les témoignages extraordinaires qu'elle cite, il y a celui d'un soldat russe, ancien prisonnier de la résistance, qui s'éprit de la cause afghane, devint musulman et l'un des proches de Massoud.
Celui d'un soldat sous ses ordres qui le trahit, mit une bombe sous le passage de sa voiture, qui explosa, mais ne le tua pas car ce jour là Massoud en avait pris une autre, et l'attendait le soir sur la route en pleurant sur sa déloyauté et l'enfer qui l'attendait désormais. Il fut pardonné!
Cet homme en avance sur son temps, ne cherchant pas le pouvoir, mais conscient des enjeux et des difficultés, avait un magnétisme, une force de conviction, qui fit qu'il pouvait retourner des situations. Il fit ce qu'il put pour développer l'école, la condition des femmes, et sans doute élever le niveau de ceux qui le côtoyaient.
Au fil des pages on découvre un homme exceptionnel, droit, intègre, ne jugeant pas, et sans doute prêt à donner de l'amour sinon de la compassion dans des situations où la réaction serait de mise.
Il appelle sa femme "Pari" c'est à dire "Ange"...