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vendredi 28 septembre 2012

La fin annonce un nouveau début

Ils sont tous les quatre attablés en train de commencer leur repas. ils me proposent gentiment de m'installer avec eux, apparemment contents de me retrouver. Moi aussi.
- "Lorsqu'on t'a vu partir l'autre jour du refuge, on ne pensait pas que tu irais bien loin!"
Je commande une boisson, un repas, et leur raconte mes mésaventures. Mon projet étant d'aller demain à Ajaccio m'acheter une paire de chaussures. Le couple prend aussi le train  demain, ils vont passer la semaine qui leur reste en bord de mer. Les deux autres continuent pour faire la partie nord. Repas sympathique et copieux, qui se termine par une liqueur de myrte avec le patron (ça arrache!).
On plante la tente à la lueur de nos frontales. Puis je retourne prendre une douche au restaurant, puisque l'offre est comprise avec le repas. Je marche vraiment avec difficulté quand je n'ai plus mes bâtons pour m'appuyer, surtout en fin de journée. Sous la douche, je constate en fait que j'ai un ongle qui bouge, ne tenant plus que sur les côtés, mais détaché de la chair au milieu. je comprends les douleurs pendant la nuit. Je ne peux pas continuer ainsi, même avec une paire de chaussures souples et confortables, je vais me massacrer le pied. Il faut arrêter.
Après une nuit inconfortable, je fais mon sac, annonce à mes jeunes amis que j'arrête et leur souhaite bonne chance pour la suite.
Un homme surveille les campeurs et vient nous expliquer que le terrain est à lui, et non au restaurant. Il vient réclamer son du. Je suis surpris car c'est annoncé nulle part. Il se met en colère. Il compte les tentes le soir, et vient chaque matin aux aurores vérifier si le nombre est le même que la veille, afin de se faire payer. Il râle parce que certains sont déjà partis. Je lui dis qu'il devrait s'arranger avec le restaurant pour que ce soit clairement indiqué. Il me dit qu'il doit leur en parler. Mais cela semble une histoire un peu compliquée, à la corse sans doute, car ce type ne va manifestement rien en faire...
Je me fais mon petit déjeuner à l'écart, ne voulant pas m'attarder sur ce terrain. Je retrouve le couple à la gazelle. Ils font de l'eau avant de poursuivre.


Cela me fait un petit pincement de ne pas continuer. Mais raisonnablement ce n'est pas possible. J'avais envisagé depuis le début que je pouvais arrêter au cas où ce serait trop dur pour moi physiquement, mais pas à cause des chaussures. Ce cas de force majeure fait que la déception est moins grande. Je me dis que je reviendrais faire la partie nord une autre fois, mieux préparé, avec un sac plus léger, et surtout des chaussures éprouvées et plus légères.
Je prends le train dans l'autre sens pour retourner vers Calvi. Une fois arrivé je retrouve le monde habituel qu'il y a sur la côte. Quel changement! Un bus amène les gens vers Calenzana au point de départ du GR.
Le chauffeur nous dit que dans la journée d'hier, suite à la chaleur, il a fallu aller chercher une dizaine de personnes qui se trouvaient en difficulté sur la première étape nord du GR. Il parait qu'il y en a beaucoup qui arrêtent assez vite. Heureusement que j'ai commencé par le sud.
Je retrouve la voiture au parking. Je me change et vais prendre un pot dans le village. Que vais-je faire? J'avais prévu d'aller faire du canoë dans les calanques. Mais là, j'ai beaucoup plus de temps que prévu.

Lâcher prise...

Je réalise que c'est très confortable d'être dans un programme, fut-il de la marche. Il y a un point de départ et un but. Chaque jour une étape. Chaque soir apporte la satisfaction de l'accomplissement de la journée. Ce n'est pas que l'on pense au but, mais en s'éloignant du point de départ, on rentre dans un voyage qui nourrit une construction mentale. Partir et atteindre le but envisagé est une forme de réussite qui comble le désir de l'engagement en question. Mais pour tout voyage, dans une certaine conscience, on n'est pas le même au départ et à l'arrivée. Il y a quelque chose de subtil qui se passe, ou pas, à notre insu.
Je vais en reparler...

1 commentaire:

philippe a dit…

Le but,c'est le chemin.
Je me souviens des discussions majeures autour de nos pieds durant le camino de St Jacques.