Membres

jeudi 25 décembre 2014

L'air du sauveur permanent

C’était sa voisine qui l’appelait pour lui proposer de passer demain après-midi prendre le thé avec elle et son amie. Il accepta volontiers. Demain serait la veille de Noël. Il sentit une joie sourde poindre au fond de son cœur. Il connaissait peu cette Madame Dustan, elle habitait ici depuis deux années seulement. Elle avait une fille qui rentrait chez elle le week end, étudiante mais il ne savait plus en quoi.

- C’est quand même curieux que je croise cette femme par deux fois en ville, puis ici avec sa voiture coincée tout près de chez moi, repartant de chez une voisine. Si son amie eut été chez elle, elle ne serait pas repartie et on ne se serait pas croisé ! Et voici que l’on est appelé à se voir, comme si la vie voulait nous faire nous rencontrer. Elle fait du théâtre, c’est bien, elle est un peu artiste alors. Je ne sais même pas son nom. Mais peu importe, que veut dire un nom ? C’est juste un son qui ne dit rien sur ce qu’est une personne…

Il dîna et se mit à préparer ses cadeaux qu’il voulait envoyer le lendemain. La pluie s’était arrêtée mais le vent soufflait encore. Soudain la lumière s’éteignit, puis se ralluma quelques secondes après. Momentanément il n’y eut plus que la lueur des flammes dans le poêle. D’ici à ce que la lumière soit coupée, se dit-il. Une minute plus tard, la lumière s’éteignit sans se rallumer. Il partit chercher un peu en aveugle la lampe dans un placard de la cuisine. Une fois trouvée il alla chercher les bougies dans un autre endroit, mais cette fois avec un minimum de clarté. Il se pouvait que cette panne dure toute la nuit, vues les conditions météo. Il ne craignait pas le noir, ni le manque d’électricité. Cela lui rappelait sa jeunesse estudiantine quand il s’éclairait à la bougie par pur plaisir. De plus il y avait le poêle, donc pas de risque d’avoir froid. Et puis un camping gaz au cas où, une forme d’autonomie en quelque sorte. Il pensa alors aux personnes qui dépendaient entièrement de l’électricité.
 
- Comment se débrouillent mes voisines ? Peut-être s’inquiètent-elles ? Hola, mais c’est moi qui m’inquiète pour elles on dirait ! Je vais appeler pour savoir.
Il chercha dans l’annuaire le numéro, mais pas de téléphone non plus. Cette fois c’est un peu plus grave ! Il se demanda s’il devait y aller à pied, si c’était opportun. Il ne les connaissait pas suffisamment pour intervenir.
 
- Je vais attendre cinq minutes. Quelle situation bizarre ! On s’est parlé tout à l’heure, la vie nous a manifestement rapprochés, et voilà que je me sens relié à des personnes que je ne connaissais pas ou à peine il y a quelques heures. Après avoir aidé pour la voiture, si j’y vais maintenant, je vais vraiment avoir l’air du sauveur permanent. Elles vont peut-être trouver que j’en fais trop. Mais qu’est-ce que je risque ? Après tout il ne se passe jamais rien de flagrant ici, et si la vie venait me chercher pour me proposer quelque chose ? Allez, j’y vais, au diable les préjugés !

Il se prépara et sortit avec sa lampe. Le vent était fort. Vraiment les éléments s'en donnaient à cœur joie. Cela donnait une impression de petitesse à Michel qui marchait prudemment dans la nuit. Une dizaine de minutes plus tard il arriva devant la maison. Il y avait une lueur à l’intérieur. Il frappa.

Aucun commentaire: