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dimanche 1 décembre 2013

Perdre


Perdre fait référence à une complétude, inévitablement.
La famille est complète avec les parents et tous les enfants. Si l’un d’entre eux disparait, il y a un manque à la complétude initiale. La question se pose alors : la complétude est-elle appelée à durer ? Non bien sûr ! Un certain temps, plus ou moins long, selon ce que donne ou prend la vie. Il est des parents qui perdent un enfant dans le tout jeune âge, il est des enfants qui perdent leurs parents coup sur coup, il est des familles qui durent, d’autres qui se déchirent…

 Tant que l’on n’a pas été suffisamment nourri, la perte est une souffrance. Etre nourri jusqu’à quand ?
Jusqu’à la nourriture fondamentale, ai-je envie de dire, qui est la disparition de la faim. Ce qui revient à poser la question de : qui perd ? Qui est-ce qui qui perd ? S’il n’y a plus de qui, il n’y a plus de perte.

Il y a deux jours j’entendais Mathieu Ricard répondre à une question d’une dame lui demandant comment il avait renoncé à la vie que tout le monde mène. Il s’est expliqué sur le sens que l’on mettait en général sur ce mot : renoncement. Il a dit qu’il avait renoncé à la souffrance. Renoncer n’est pas se priver, mais se tourner vers quelque chose de plus grand au dépens de choses moins essentielles qui n’apportent rien au final.
Est-ce que perdre diminue l’être ? C’est dans la même veine.

Se nourrir d’avoir sans faire grandir l’être témoigne d’une pauvreté intérieure.
Il y a des pertes, apparentes, qui font grandir. Rien ne nous est donné définitivement. Il n’y a rien de stable sur quoi s’appuyer : une situation peut changer, un être peut mourir, un vol, un accident, la santé peut flancher. C’est ainsi. Ne rien prendre pour acquis. Il vaut mieux se préparer à la perte, ou l’envisager, que de chercher ou s’attendre à accumuler toujours plus. Ce qui n’empêche pas les belles choses d’arriver, comme un changement dans le travail, une nouvelle rencontre enrichissante, une demande enfin entendue…

Pour surmonter une perte, il semble indispensable de ne pas se sentir perdu. Et pour ne pas se perdre il faut se trouver soi même. La perte nous renvoie inévitablement à ce que nous sommes réellement. Si je me suis appuyé sur ce qui s’effondre, alors le passage risque d’être difficile.
La perte d’un maître nous renvoie par exemple à notre propre pratique. Avons-nous institué une pratique du grandir, ou substitué un remplacement d’un super parent ?

La perte est un miroir.
Vive la disparition de l’enfant perdu…
 

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Merci Yannick! Cela m'aide... Sabine (Perpi)

Yannick a dit…

Ce que l'on reconnait en le lisant, c'est comme si cela venait de nous même. Hello Sabine.

Mabes a dit…

il y a plus de vingt-cinq ans j'écrivais une Complainte de l'enfant perdu !! Tu me donnes envie de la relire et de faire le point ;-))
merci Yannick pour ces réflexions.

Yannick a dit…

Tiens nous au courant, Mabes.

Anonyme a dit…

"Ce que l'on reconnait en le lisant, c'est comme si cela venait de nous même"...oui..merci de ce rappel..
J'ai beaucoup aimé, en particulier, " le maitre, super parent " et si notre maitre intérieur était ce super parent ?
Francine C.