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vendredi 14 janvier 2011

Jean et le miroir

Photo d'Alain Chevillat (Moines du désert)

Luc reprit la parole :
- Le risque avec une belle vue est de se perdre. Il faut essayer de regarder sans regarder, apprécier sans saisir. Il faut sentir que l'on fait partie du paysage, ne pas s'en dissocier. Etre avec l'horizon et être avec soi même.
Jean essayait de sentir afin que les paroles prennent vie au tréfond de lui.
- Cette vision est comme le miroir posé sur notre front qui se déplace. Lui ne change pas dans sa capacité de refléter ce qui est en face. Il fait face et il s'efface. Le réel ne s'accroche à rien. Ce faisant tout reste paisible.
Juste voir. Ne rien vouloir. Ne rien chercher....
Allons cueillir des légumes, fint-il par dire.

Luc avait des sandales, des pieds nus. Ses mains étaient des paluches (mot ancien qui signifie comme des pelles), c'est à dire des mains qui ont été façonnées par le travail manuel, noueuses comme des brindilles, comme si toute l'intelligence de cet homme passait dans ses mains. On voyait ses yeux et ses mains, le reste suivait et n'avait plus d'importance.
Un vieux pantalon sans forme, une chemise ouverte. Il était bien sur âgé, mais on sentait une énergie fluide qui emmenait le visiteur malgré lui.
Jean se disait qu'à côté d'une personne comme ça, la vie semblait facile, évidente, sans possibilté d'obstacle quelconque. Il buvait cette présence jusqu'à la lie.

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