Y a t-il des choses pour lesquelles nous sommes responsables, et d'autres non? Et lesquelles?
Il y a toujours des moyens de se cacher derrière une situation dont on ne veut pas assumer la responsabilité. C'est si facile de se démettre. Mais où commencent la responsabilité, et la non responsabilité?
La vie est bien de passer de l'état d'enfant, sans responsabilité, à celui d'adulte, c'est à dire responsable. Responsable, c'est à dire en état de répondre à une situation donnée en toute connaissance de cause. Il est vrai que l'on ne connaît pas toujours les répercussions d'un acte. On peut donc essayer de faire au mieux selon la conscience que l'on a.
C'est est une chose quand cela n'engage que nous, dans une sorte de solitude ou l'autre n'existe quasiment pas. Par exemple, je crie sur la plage déserte, il est évident que je ne dérange quiconque. Autre exemple, je passe en moto dans une rue la nuit, en faisant du bruit, et j'emmerde les gens qui dorment chez eux dont je me fous royalement. Deux exemples opposés, mais qui montrent que tout est possible à tous les niveaux.
Dans une société, nous sommes à la fois responsables de nous mêmes mais aussi de tous les autres en commençant par ceux qui nous sont le plus proches. La responsabilité est quelque part liée à la morale, au fait que la conscience du grandir en maturité nous oblige à l'autre.
Arnaud Desjardins parle d'aider à soigner, c'est à dire prendre soin, ou de contribuer à la maladie, non seulement de la terre ou du monde, mais de l'autre au bout du compte.
Il est évident que cultiver chimiquement va dans le sens de la destruction du vivant, et cultiver en biologie le respecte. Il est évident qu'un médecin soigne, et qu'un soldat apprend à tuer. Cela semble extrême, mais c'est à tellement de niveaux. Car pour que le soldat soit armé, encore faut-il qu'il ait du matériel. Et qui fabrique ce matériel? Qui fabrique les armes, les chaussures, les casques, toute la technologie qui va avec? Où commence la responsabilité? Chez celui qui appuie sur la gâchette, celui qui aligne les projectiles dans l'usine, celui qui livre, celui qui commande, celui qui vérifie la conformité, celui qui a inventé le procédé ou l'a perfectionné, celui qui prend la décision d'attaquer?
Cela en fait du monde! Faut bien travailler répondront certains. Oui, oui, on peut dire ça!
Je reviens sur ce qui me fait écrire cet article.
Samedi dernier, je faisais donc la queue pour assister à la présentation de son dernier livre par Christian Bobin. La salle faisait seulement 120 places alors qu'il y avait certainement 200 personnes de plus qui voulaient rentrer. Mauvaise appréciation de l'organisation vraisemblablement.
Donc pas mal de gens qui ont attendu près d'une heure pour rien se mettent en colère et invectivent les personnes de la sécurité.
Imaginez la scène : la salle doit avoir 120 places assises, mais on peut certainement mettre des gens assis dans les allées ou debout, et cela en grand nombre. Mais le réglemente est le règlement, et en France les administratifs sont très forts dans le genre. S'il y a un incendie, on sauve 120 personnes, mais s'il y en a plus, non. Malheureusement il n'y a pas eu d'incendie, et donc la sécurité n'a rien prouvé du tout. Par contre elle a fait des frustrés en mettant ses barrières. Je ne parle pas pour moi. Mais j'en ai vu et entendu.
Certaines personnes se sont donc permises d'exprimer leur colère vis à vis de ces gens habillés en bleu, avec une étiquette marquée "Sécurité". Le problème c'est qu'on ne discute pas avec ce genre de personne, ce sont des exécutants, des chiens de garde. Par contre ayant reçus les invectives de colère de certains qui avaient besoin d'un bouc émissaire, ils disaient par la suite, je l'ai entendu : "On n'y est pour rien!" Effectivement ils appliquent le règlement, et ne font donc que leur boulot d'applicateur de règlement, quelque soit la raison derrière.
C'est alors que j'ai réalisé que sans doute, en agissant ainsi, ils aimeraient qu'on leur sourit, que les gens restent aimables envers eux, alors que certains se sentent tellement frustrés. C'est tout bonnement pas possible! Il faut faire autre chose messieurs.
Il y a des métiers qui ne seront pas reconnus dans le sens d'une appréciation. Il faut de tout, c'est un fait, mais il y a des acteurs qui auront tellement moins de reconnaissance que d'autres. Si on espère des sourires, des remerciements, il faut travailler dans le don, dans l'échange humanisant, dans le constructif du vivant, et encore ce n'est pas forcément gagné. Mais les chiens de garde d'un système qui sépare, qui opprime, qui enlève, qui met de la tension, ne peuvent clairement pas s'attendre à autre chose que de la colère, de l'incompréhension...
La responsabilité et l'irresponsabilité se cachent parfois bien plus loin que derrière les apparences. Il est bien sûr facile de se cacher derrière un règlement d'une administration ou d'une société que l'on n'a pas mis en place, mais en y participant on est inévitablement solidaire du système.
C'est d'un autre engagement que d'être autonome dans la plupart de ses choix de vie.
J'ai un faible pour l'insécurité, vous l'avez deviné....