N’ayant
pas de soucis je suis allé dans un grand magasin pour en trouver. Me renseignant
pour savoir où ils étaient, j’ai bientôt compris que la plupart des gens en
avaient déjà.
-
Pourvu qu’il en reste encore, me suis-je dit, le stock est peut-être déjà
épuisé !
Je
m’approchai du stand intitulé : « Aux cent soucis ». Il
y avait du monde. Certains parlaient entre eux, et je saisissais quelques
phrases.
-
Moi j’en achète pour mon frère, c’est le cadet de mes soucis.
-
Je n’ai que des gros soucis, je préférerais en avoir des petits.
A
vrai dire je ne savais pas quoi choisir, valait-il mieux commencer par des
petits ou des gros? Quelqu’un m’a dit que les petits ne duraient pas longtemps,
décidément on vend de la camelote partout, mais que les gros étaient beaucoup
plus lourds à porter… Bon je prendrais un sac s’il le faut, je n’ai pas envie d’investir dans quelque
chose qui ne tient pas la distance !
Certains
qui avaient déjà beaucoup de soucis, à ce que je comprenais, en voulaient
toujours plus, une vraie addiction. Il y a vraiment des égoïstes, me disais-je.
-
Pas de soucis, dit la vendeuse, il y en aura pour tout le monde.
Je
voyais bien que certains se prenaient la tête, d’autres se faisaient des
cheveux blancs, ou du mouron, des habitués certainement… Il n’y a quand même
pas de quoi se ronger les sangs !
Il
y avait aussi une association : les SSF, ou Sans Soucis Fixes, les pauvres
pensais-je, sans doute des gens déracinés.
Tout
le monde parlait de ses propres soucis en tout cas, cela semblait un sujet
inépuisable. J’avais vraiment l’air d’un idiot, n’ayant rien d’intéressant à
dire.
C’est
alors que quelqu’un m’a dit qu’on pouvait se faire du souci tout seul.
-
Ah bon, ce n’est pas la peine d’en acheter ? dis-je incrédule.
-
Non, non, là c’est pour les habitués, on les appelle les soucieux, ils ont tous
déjà leurs propres soucis, mais ils veulent avoir les mêmes soucis que les
autres, alors ils viennent en acheter ici. On y trouve un bon renouvellement de
soucis.
Je
remerciai cet homme, et quittai la queue sans souci. Je m’aperçus en sortant
que je ne lui avais même pas demandé comment se faire du souci, je ne suis
vraiment pas malin…
2 commentaires:
On dirait du Raymond Devos ..!?
Merci, c'est un beau compliment.
Enregistrer un commentaire