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mercredi 16 mars 2022

Perdre son identité (suite)

 29 juin 2015, date à jamais marquée dans ma mémoire. Il y a un avant et un après. J'en ai déjà parlé.
Je rentre dans l'eau avec précaution pour me baigner, je la trouve très fraîche. Puis un grand blanc... et je me réveille dans une chambre d'hôpital.
Heureusement je n'étais pas seul. L'amie avec qui j'étais me  voit flotter dans l'eau sans bouger. Inquiète, elle finit par s'approcher. Heureusement encore des sauveteurs tout proches accourent, et me tirent de l'eau. J'ai du en boire car ils me retournent pour évacuer l'eau. Je perds connaissance, ils me font un massage cardiaque pour me réanimer. Je demande ce qui s'est passé, personne ne sait. On appelle un médecin en urgence. Au bout d'un moment il me demande de bouger mes membres. Aucune réaction. Il comprend que la moelle épinière doit être atteinte et que c'est plus que grave. Il appelle un hélicoptère pour l'hôpital le plus proche. J'étais en maillot de bain, j'imagine qu'ils ont mis une couverture sur mon corps. Ils ont demandé ma carte d'identité, et l'appareil s'est envolé. C'est ce que mon amie m'a raconté, car je n'ai aucun souvenir.

Avec le recul, je pense que j'ai vraiment failli mourir, il s'en est fallu de peu. J'ai eu deux vertèbres cervicales cassées, et donc la moelle épinière atteinte. A l'hôpital, alors que je ne peux absolument pas bouger, on m'annonce que je suis atteint de tétraplégie. Ils diagnostiqueront plus tard que ce n'est pas le niveau ultime, encore une fois heureusement. Sur le moment je ne me rends pas vraiment compte. Mon corps est touché à différents niveaux, dont un poumon, et je vais rester dix jours en réanimation. Il n'y a que le présent qui tout d'un coup s'impose. Le futur, c'est sans doute une vie en fauteuil roulant, si je m'en sors.
Une partie de moi est morte, c'est évident, et mon approche de la mort a bien changé depuis.

Mais la vie a continué de me jouer un tour à sa manière. On ne savait pas où était passée ma carte d'identité. Personne n'a pu me dire, et bien sûr n'a vraiment cherché. Pas de responsable... Elle ne sera jamais retrouvée.
Je trouvais le symbole, ou le message, un peu fort. Ce n'était pas encore mourir à soi-même, mais ça allait laisser des traces. J'y voyais un clin d'oeil de la vie. J'ai eu la  chance de retrouver progressivement une réelle autonomie. Et je me dis aussi que je ne comprends que mieux, depuis cette aventure, ce qu'est la désidentification. Quoiqu'il arrive, la conscience est bien au delà de tout ce qui est physique, qui de toute façon se dégrade et finit par mourir.
La liberté c'est de ne rien regretter! Ca prend du temps...


2 commentaires:

philippe a dit…

Bonjour Yannick,
Merci de ton témoignage.
Il me semblait que l’accident grave le 29 juin 2015 était dû à une pirouette gymnastique et que tu était mal tombé sur la plage.
Avec toi
Bon printemps généreux et florissant même en ce monde chaotique.

yannick a dit…

Oui, c'est ça, mais en courant vers l'eau.
Que l'énergie printanière nous lave... Les premières fleurs sont là, et chaque jour je regarde pousser les bourgeons des figuiers.
Bien à toi.