Depuis des années je pense à un petit périple à pied : longer la côte depuis l'embouchure de la Gironde jusqu'à la frontière espagnole. A part les derniers kilomètres, il n'y a que du sable, une plage infinie bordée de dunes plus ou moins hautes. Je suis né dans cet univers et le connais bien sans m'en lasser une seule fois. Alors le rêve de "descendre" cette côte, plus ou moins déserte, sauvage, qui en porte même le nom par endroits, s'est installé progressivement. Il faut compter environ 250 km, soit entre huit et dix jours de marche. J'en ai déjà fait des petits bouts, histoire de me laisser happer par cet horizon sans cesse renouvelé. Histoire de découvrir que la marche dans le sable n'est pas aisée, car si cela va encore sur le sable dur, mouillé, c'est vite fatigant sur du sec, du sable mou, ou plus ou moins. A cela quand on ajoute un sac à dos, pendant des heures, on a vite compris qu'il faut sans cesse chercher le meilleur endroit pour ne pas se fatiguer inutilement. Un sentier donne un certain rebondi au pied, mais dans le sable, dès que ça enfonce, même légèrement, la cheville travaille, puis la jambe, les hanches, et cela devient vite pénible.
Il faut deux ou trois jours pour s'installer dans le rythme de la marche, pour découvrir ce rythme de la lenteur, de l'autonomie vagabonde, qui rétrécit le monde à nos vrais moyens, modestes mais bien réels, que faussent complètement les moyens de transport habituels. La notion du temps et des distances qui changent, tout qui change en fait, car c'est aussi un nouveau rapport à soi même.
Il faut un temps de vacances suffisamment long pour entreprendre ce petit voyage, il faut aussi une météo agréable, pas de grosse chaleur... A priori j'excluais l'été, où je privilégie autre chose. Alors quand? Les années passaient et l'idée restait dans la tête. Je me suis dit ensuite que faire de la Gironde à Arcachon ou au Cap Ferret serait plus facile, en temps, et déjà pas mal.
Je commence à regarder la carte, à estimer des étapes pour savoir où faire le ravitaillement, en particulier l'eau, car c'est le point clé de toute marche même en autonomie, regarder les horaires de train, de cars, pour accéder au départ puis rentrer à la maison. Partant avec une amie, il faut acheter une tente ultra légère, car le poids est déterminant pour le confort de la marche à pied.
J'adore faire cette recherche de matériel de randonnée, évaluer le côté pratique, le poids, l'encombrement... Je me rends à Décathlon où j'essaie tous les matelas proposés en les mettant par terre, m'allongeant au milieu de l'allée. Je cherche une solution plus confortable que le matelas mousse que j'utilisais jusqu'à présent. Je regarde les sacs à dos, je voudrais changer le mien pour un plus petit et ultra léger. J'en sélectionne deux, les remplis, les charge, les teste pour savoir lequel prendre, rentre chez moi, compare avec le mien... Que vais-je emporter exactement? Ma référence étant le GR 20 en Corse où il faut appréhender la montagne et ses changements de temps. Là je vais faire plus léger. Déjà il n'y aura pas de grosses chaussures, juste des pieds nus de marche. Je reçois la tente juste avant de partir, et nous la montons dans le jardin pour voir à quoi elle ressemble et le confort qu'elle offre. Elle fait à peine plus que deux kilos. Cela sent le voyage!