Lo speco, c'est une caverne, une grotte, en italien.
D'innombrables histoires racontent la vie de saints ou d'ermites qui se sont retirés dans des lieux à l'écart pour se consacrer à la vie spirituelle. La grotte est un moyen simple de trouver un abri pour vivre de peu, voir presque rien. Que ce soient les pères du désert aux premiers siècles, Milarepa au XI ème siècle en Himalaya, les pélerins russes, Kyentse Rimpoche au début du vingtième, Charles de Foucault dans le désert, ou d'autres encore aujourd'hui, tous mus par un profond désir du divin, ils ont choisi la solitude pour pratiquer l'assise et le silence.
Saint François est de cette veine, au début des années 1200.
Ces êtres, s'ils sont déterminés, n'ont pas tout gagné d'avance. Hormis de rares exceptions comme Ramana Maharshi ou quelques autres, le travail de libération prend un certain temps. Il faut lutter contre le mental, "le diable" dans la tradition chrétienne, purifier sans cesse, pour que la paix du coeur qui est promise puisse se vivre de manière inconditionnelle.
Et François luttait contre les influences de sa jeunesse, contre le fait qu'il ne se consacrait peut être pas autant qu'il l'aurait voulu à la prière et à la vie méditative. Il restait en lui une culpabilité, un jugement qui était celui de la non acceptation parfaite de ce qu'il était tel qu'il se connaissait. En termes chrétiens c'est l'état de pêcheur qui n'est pas digne du regard de Dieu et de son amour. Demander à Dieu le pardon, si c'est un acte d'humilité, c'est encore mettre une séparation, c'est ne pas s'abandonner à la confiance totale tel que l'on est.
C'est dans ce lieu, lo speco de Poggio Bustone, la grotte des révélations, que François va vivre cet éveil, ce pardon définitif, cette renaissance spirituelle.
Je m'engageais donc sur ce chemin qui s'élevait 300 mètres plus haut, ponctué de petites chapelles, en mémoire de certains épisodes de vie du saint homme. Un sentier abrupt, avec des marches, et ces arrêts où je lis les quelques lignes sur Saint François.
J'arrive à une sorte de chapelle adossée à la paroi de la montagne. Cela fut construit autour de la grotte, bien après sa mort, comme c'est souvent le cas. Je pousse une grille, puis rentre par une porte que j'ai quelque mal à ouvrir. Il y a d'abord une petite chapelle voûtée, qui fut rajoutée en dessous de la grotte, avant de découvrir un passage qui donne dans la grotte proprement dite.
Il y a deux lieux distincts, un autre chapelle minuscule, sur laquelle j'ouvre une porte pour donner de la lumière, et un pan de rocher en creux où ont été déposées des petites croix en brindilles, toutes fragiles de leur simplicité, rappelant la pauvreté franciscaine.
Cela me fait quelque chose d'être là, en ce lieu où cet homme si pieux connut l'éveil spirituel il y a 800 ans. Je m'imprègne du silence. Puis je laisse un mot sur le cahier dans la première chapelle, referme les portes, et me retrouve dehors ébloui par le soleil.
Quelques mètres plus loin la croix en forme de Tau dessinée sur le sol avec des pierres.
En redescendant, je croise l'homme que j'avais vu couché bras en croix dans l'église en arrivant. On se salue. Je lui indique le temps qui lui reste pour arriver à la grotte. Le retour me semble plus court.
En écrivant là, maintenant, je me sens transporté là bas...
2 commentaires:
Il y avait aussides Tau et autres flèches en pierres sur le chemin de St-Jacques.
Oui, bonjour Philippe.
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